Quel destin hors du commun que celui de l’arrière-petit-neveu de Napoléon, devenu au début du XXème siècle un membre éminent du gouvernement américain !!!

L’histoire commence lorsque Jérôme, le plus jeune frère de Napoléon, épouse à 19 ans une jeune et riche héritière de Baltimore, Elisabeth Pattinson. Ce mariage n’est en aucun cas reconnu par l’illustre frère qui mettra tout en œuvre (avec succès) pour le faire annuler. Mais il en reste une lignée, dont Charles Joseph Bonaparte (1851 – 1921), américain à cent pour cent, fervent catholique, diplômé de l’école de droit d’Harvard où il rencontre son épouse, avocat des pauvres, militant, farouche adversaire de la corruption et promoteur de la réforme de la fonction publique, opposé au clientélisme.

Fustigeant « la petitesse, l’égoïsme et la timidité des membres du Congrès », il affirme son mépris pour les millionnaires, les « bosses » qui intimident et corrompent les hommes politiques jusqu’à réellement gouverner l’économie et les Etats, ces « barons voleurs » des mauvais trusts.

Il s’oppose au « spoil system » qui consiste, à chaque nouvelle élection, à remplacer les fonctionnaires en place par des affidés défendant des intérêts privés, au mépris des compétences et du mérite. Une pratique introduite par Andrew Jackson (1829 – 1837) et dont nous constatons l'inefficacité aujourd’hui.

La rencontre avec Théodore Roosevelt, et l’aide de journalistes d’investigation, va donner corps à la lutte contre la corruption. Bonaparte et Roosevelt sont de la même génération. Une amitié indéfectible va les lier. Après l’élection à la présidence de Roosevelt (1901 – 1909), Charles Joseph Bonaparte va devenir successivement ministre de la Marine puis ministre de la Justice.

Fin 1906, Bonaparte reprend la lutte contre Standard Oil. En 28 mois, il fera plaider 560 affaires devant la Cour Suprême, plaidera lui-même dans 49 dossiers. Cependant, il lui manque une équipe de détectives capables de rassembler des preuves pour étayer les dossiers.

L’occasion : la lutte contre la dilapidation des terres fédérales allouées à l’Ouest alors en plein développement. La création d’une police fédérale indépendante et disposant de moyens propres, à l’intérieur du DOJ (ministère de la Justice) sera longue et difficile, tumultueuse face à l’opposition du Congrès et d’une partie de la Presse.

Le Bureau Of Investigation est créé le 26 juillet 1908, une force d’agents spéciaux avec un noyau de 9 agents issus du secret Service et 25 de différents ministères - les G Men. Pendant la Grande guerre, le BOI se consacre à la lutte contre l’espionnage et l’infiltration d’agents allemands, ensuite contre le crime organisé.
Charles Bonaparte se retire de la vie politique à la fin du mandat de Théodore Roosevelt. Il n’est pas favorable à la politique de Woodrow Wilson et craint ses illusions pacifistes de la SDN.

Le BOI sera rebaptisé FBI en 1935 par son indéboulonnable directeur, John Edgar Hoover, en poste jusqu’à sa mort en 1972.

Charles joseph Bonaparte décède le 21 juin 1921.

Au-delà de la biographie d’un américain de conviction qui a énormément œuvré pour son pays, l’ouvrage donne un éclairage sur certaines tendances profondes de la vie politique américaine, toujours renaissantes.

Charles Joseph Bonaparte, l’inventeur du FBI, biographie de Laurent Moënard, publié chez Passés/Composés, 286 p., 22€